Julien Bing : « Depuis tout petit, j'ai le syndrome de l'humour »

« Celui qui voulait monter sur les planches » aurait pu être le nom d'un épisode de Friends. Pour Julien Bing, c'est une réalité. Avec son premier spectacle, Toute la vérité, rien que la vérité... ou presque,
l'humoriste originaire de Dunkerque concocte un savoureux mélange,
entre stand-up et personnages. Rencontre avec un artiste intelligemment
maladroit.

Sortir : À quel moment se dit-on : « c'est décidé j'ai envie de faire rire les gens sur scène » ?
Julien Bing : Je préfère garder la réponse pour moi (rires). Depuis tout petit, j'ai le syndrome de l'humour. En CM2, je faisais rire mon institutrice et je pense que ça s'est jamais arrêté. Pour moi, la classe était un théâtre et je mettais tout le monde dans le même panier, je faisais aussi rire les professeurs. Ils savaient que j'étais le gars sympa, que j'avais toujours la bonne blague.

Sortir : Quelle a été ta première fois sur scène ?
J.B : J'ai 17 ans et je présente un sketch qui s'appelle « le baccalauréat ».C'était à la fin de l'année scolaire, en terminale. Si un élève avait un talent, il pouvait le mettre en scène devant tout le lycée, y compris les professeurs. Il y avait des musiciens, il y avait des chanteurs et moi, j'ai fait un sketch.

Sortir : Comme nom de scène, tu utilises Bing (en référence à Chandler dans Friends). À quel point ce personnage a eu une influence sur ta carrière ?
J.B : J'ai été bercé par cette série comme du petit lait maternel. Je suis de la génération 90 donc ça passait sur France 2, on découvrait des épisodes avec cet humour sarcastique, notamment grâce à Chandler. J'avais une sympathie pour ce personnage, qui ne m'a jamais quitté et que je mets un peu sur scène. J'aime cet humour, jamais méchant ou rabaissant.

Sortir : Hormis le personnage de Chandler, as-tu d'autres inspirations ?
J.B : J'aime beaucoup l'humour de Pierre Niney, François Civil et les séries du réalisateur Igor Gotesman. Ça, c'est clairement mon humour. En terme artistique et humoristique, j'adore ce que fait Manu Payet. C'est le spectacle qui m'a fait le plus rire ces derniers temps.

Sortir : En 2020, tu quittes ton emploi pour te lancer dans l'écriture de ton spectacle, Toute la vérité, rien que la vérité... ou presque. Vivre de son rêve, c'est accepter de faire des sacrifices ?
J.B : Le mot sacrifice est fort. Quand on aime quelque chose, il ne faut pas le considérer comme un sacrifice mais comme un objectif à atteindre. Mais si je devais partir dans ce sens là, je dirais que oui. Les sacrifices sont au quotidien. Quand tu as un objectif à atteindre, t'es obligé d'avoir des œillères, un peu comme un gars qui rentre en première année de médecine. Tu vois moins de monde, tes relations amoureuses sont compliquées ou t'en as pas pendant cette période. Ces dernières années, j'ai vécu ça… et je le vis encore un peu.

Sortir : Et ça t'attriste de devoir faire des concessions ?
J.B : C'est un mood qu'il faut tenir. Tu peux avoir des moments de tristesse quand c'est dur. Tu te dis « est-ce que le jeu vraiment en vaut la chandelle ? ». Et quand c'est quelque chose qui t'anime depuis l'enfance… on lâche rien, on reste dans son couloir et on y va à fond. Est-ce que j'ai déjà eu des moments de bad mood ? Oui. Est-ce que j'ai déjà eu le cafard ? Oui et ça m'arrive de temps en temps. Le tout, c'est de se dire que demain sera un autre jour.

Sortir : Depuis quelques années, tu tournes dans toute la France avec ta première création. Avec le temps et l'actualité, est-ce qu'elle évolue ?
J.B : Ce sont des sujets universels. Je ne suis pas politique, à me dire « il faut que je change la blague parce que le premier ministre a dégagé machin ». Moi, c'est vraiment des sujets du quotidien. Plus tu joues un spectacle et plus tu connais les forces d'un sketch ainsi que ses faiblesses, donc tu vas les travailler. Je dis aux gens qui sont venus me voir à mes débuts que ça n'a plus rien à voir. Le spectacle est plus mûr, plus travaillé et plus raisonné.

Sortir : Est-ce qu'il y a des sujets que tu préfères ne pas aborder ?
J.B : J'ai un sketch où j'aborde un peu le féminisme. C'est un sujet assez touchy, tellement vaste et avec toutes les lettres de noblesse que peut avoir cette cause. Donc, je fais très attention à ce que je dis. C'est un sujet qui est beaucoup repris sur les réseaux sociaux. Une blague mal interprétée ou sortie de son contexte, c'est la fin.

Sortir : En parallèle de la scène, tu réalises des vidéos humoristes sur les réseaux sociaux. Comment t'es venue cette idée ?
J.B : Après une rupture, comme quoi… (rires). Je me suis dit « de quoi je peux parler ? », j'ai eu l'idée du célibat et ça a démarré comme ça. J'ai gardé une régularité avec ce fil rouge, même si j'en sors de temps en temps. J'ai un noyau de personnes qui peut se retrouver dans ce que je dis et je l'alimente.

Sortir : Tu fais régulièrement rire de tes propres déboires ?
J.B : Oui et pourvu qu'il m'en arrive encore. C'est toujours mieux de rire du malheur plutôt que de la joie. Si je te raconte une blague que tu pourrais lire dans un journal, ça n'a pas le même impact que si je te raconte quelque chose d'un peu plus moins joyeux où je mets des blagues.

Sortir : Entre les vidéos et la scène, comment fais-tu pour jongler entre ta vie professionnelle et personnelle ?
J.B : C'est un équilibre, comme un funambule. J'ai mes journées de travail mais je me libère du temps pour faire du sport, voir mes amis. Mais on ne va pas se mentir, psychologiquement on est toujours en train de réfléchir, d'être à l'affût de ce que va dire quelqu'un pour trouver une idée humoristique. Petit à petit, j'arrive à me détacher. C'est un travail !

Sortir : En l'espace de quelques mois, tu es passé d'un statut de talent à suivre à celui d'un artiste confirmé. As-tu
senti cette bascule ?

J.B : Je l'ai un peu senti en rentrant des vacances d'été où j'avais fait pas mal de vidéos, notamment avec un ami. Une vidéo où je parle à sa fille de trois ans a vraiment fonctionné. Je parle aussi beaucoup du Nord et je le ressens quand je sors dans la rue, que ce soit sur Lille ou Dunkerque. Et je reçois que des gentillesses ! La bascule me fait plaisir parce que c'est le fruit de mon travail. Quand je suis seul chez moi, dans mon canapé, à prendre mon téléphone, que je mets cette vidéo sur internet et qu'elle plaît aux gens, j'ai les conséquences de mon travail. C'est une pression constante… il faut savoir la gérer, faut pas qu'elle t'abîme et faut toujours prendre du plaisir dans ce que tu fais. Il faut essayer de s'en détacher un maximum et l'accepter aussi quand elle est là.

Sortir : As-tu des rituels avant de monter sur scène ? Un grigri ?
J.B : J'ai toujours des trucs positifs en tête, c'est très psychologique. Je me dis, « ça va bien se passer, ça va bien se passer ». Je ne me mets pas de mauvaise idée en tête, je ne pense pas à des trucs tristes avant de jouer.

Sortir : D'autres projets à l'avenir, hormis la scène et les vidéos ?
J.B :
Je fais ce métier pour faire du cinéma, je m'en suis jamais caché. C'est déjà très difficile de faire l'humour et de rentrer dans cette maison, je pense que c'est encore plus compliqué de rentrer dans la maison du cinéma. Cependant, je me dis que j'aurai peut-être cette chance de me faire repérer par les réseaux ou par la scène. Puis, je suis un vrai cinéphile ! Dès que je vais au cinéma, j'adore m'imprégner des personnages. Je suis en admiration devant les comédiens donc oui, le cinéma est un objectif.

Sortir : Personne ne t'a contacté ?
J.B : Pour l'instant, non… il faut être honnête (rires).

Publié le lundi 3 mars 2025 par Morgane Morel
Du 11 au 12 avril à 20h30, Le Petit Chapeau Rond Rouge, Bruxelles

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