Peurs d'hier et outils de demain

Tout y est autant question de fidélité et d'affinités que d'une certaine veille artistique, celle-là même qui permet aux antennes de l'équipe du festival de découvrir les artistes précurseurs susceptibles de venir à la rencontre du public. Autour de l'exposition centrale et regroupées sous l'intitulé Nouveaux monstres, ce ne sont ainsi pas moins de 16 installations qui cohabiteront le temps du festival. Andrew Bell redécorera les murs de l'espace Sculfort de ses créations peu ragoûtantes, Boris Debackere invitera à jouer à un voyage vertigineux dans Probe, un peu sur le même modèle, Félicie D'Estienne D'Orves met le visiteur en phase avec les lumières et les sons de son Gong Série Cosmos. Au rayon décalage demandez le Furman de Paul Granjon, au rayon gore le Dream Diorama de l'Australien Mark Powell ou l'Instrument for the measure of absence des Américains de Temporary Distortion. Poursuivez par le vertige des Hysterical Machines de Bill Vorn, êtres mécaniques supportant pas la présence humaine, les innombrables caméras qui scruteront les visiteurs de Desire of Codes du Japonais Seiko Mikami, les étonnants Shadow Monsters de Philippe Worthington générés par les ombres des mains des visiteurs avant de finir par Akousmaflore des Français de Scénocosme, jardin interactif réagissant à la présence de l'homme. Autant d'oeuvres et d'artistes traversés par des interrogations ancestrales et quotidiennes à la fois.

L'expérience se poursuit bien évidemment sur scène autour d'artistes qui ont empoigné les nouvelles technologies pour les intégrer à leur démarche. C'est le cas de la chorégraphe Mylène Benoît qui ,avec La chair du monde, revisite sur la scène la façon dont la violence est présentée sur nos écrans. L'autre monstre, c'est Jan Fabre qui avec Orgie de la tolérance, son dernier spectacle en date, questionne la société du tout permis avec l'outrance et la force qu'on lui connaît. Sur un ton plus léger Halory Goerger & Antoine Defoort dans &&&&& & &&& (ça ne s'invente pas !) jouent avec la science et ses possibilités sur le ton d'une gravité décalée. Même décalage avec DTC (on est bien) des zigotos de Clinic Orgasm Society, quant à O_Rex de Crew il invite à une expérience déroutante entre un spectateur muni d'un casque et d'écouteurs dont les sens sont trompés comme ceux du public... La chorégraphe argentine Constanza Macras et ses énergiques interprètes  proposeront dans Hell on Earth de partager l'équipée d'adolescents allemands. Et tandis que Thierry de Mey et Jean Geoffroy conjugueront leurs talents pour une nouvelle version de Light Music, concert orchestré par le mouvement de mains, il ne faudra pas manquer la venue de Arias with a twist de Joey Arias et Basil Twist, fantaisie brindezingue made in aujourd'hui. Du Japon aux États-Unis en passant par l'Argentine, la Belgique, l'Australie ou la France, VIA continue donc de se bâtir autour des arts de demain et des artistes qui font le pari de s'en emparer. Rien de plus légitime dès lors que ce soit autour d'un fort socle transfrontalier entre Mons et Maubeuge que se construise un tel événement aussi volontiers dérangeant que novateur, inventif que polémique, aussi audacieux technologiquement qu'ancré dans les questionnements d'aujourd'hui. Urgemment indispensable en tout cas.